Nouvelle écrite à l’occasion d’un AT sur les liens entre les hommes et la nature.
Ange s’arrêta sur le pas de la porte, le souffle coupé par le charmant spectacle qui s’offrait à sa vue. Le jour commençait tout juste à se lever et offrait une lumière douce très particulière. Une forme claire se dégageait des ombres qui l’entouraient. Une rivière d’or tombait en cascade légère, épousait la forme des reliefs, avant de s’évaser en arrivant en bas. Ses boucles et ses noeuds lui donnaient un aspect aérien et renforçaient l’image de légèreté. L’or formait un rideau de lumière dans la semi-pénombre environnante, il concentrait la lumière et attirait irrésistiblement le regard. Puis il descendait et se perdait dans les ombres… La beauté le saisit une fois de plus.
Il s’approcha à pas feutrés pour ne pas troubler la quiétude de la pièce et sa main caressa tendrement la gorge de Gaia. Elle remonta lentement vers les deux ovales délicatement posées sur les lacs jumeaux au bleu cristallin. Elle redescendit ensuite dans la gorge avant de remonter pour suivre la courbe pure des collines. Elle atteignit la montagne de Vie. L’émotion le saisit une fois de plus tandis qu’il effleurait cette formidable pulsion d’Amour et de Vie.
La puissance de la nature l’émerveillait chaque jour, cette magnifique capacité à créer et protéger la vie. Plus personne ne prenait le temps de l’admirer, à présent…
Le monde d’Ange s’agita soudain et il s’assit au bord du lit, alarmé. Mais le calme revint après un bref instant. Il arrêta le mouvement qu’il avait esquissé. Gaia dormait, inutile de la troubler. La jeune femme bougea à nouveau et sa main se posa délicatement sur son ventre arrondi. Comme un écrin d’amour protégeant un trésor du reste du monde. Ange et Gaia. Gaia et Ange. Deux bientôt trois. Une fois de plus, l’amour s’empara de son âme tandis qu’il contemplait sa compagne endormie. La respiration calme de cette dernière le rassérénait. Il quitta la chambre après une dernière caresse sur le front de la jeune femme.
De retour dans la pièce principale du petit appartement qu’ils partageaient, Ange se servit un verre d’eau et alla s’accouder sur le minuscule balcon. D’où qu’il tourne le regard, la ville s’étalait à perte de vue, grise et tentaculaire. Les larges boulevards partaient dans toutes les directions, coupaient l’espace en quartiers et les quartiers en îlots. Une succession de carrés gris, aux dimensions identiques, parfois tachetés d’un éclat de couleur.
Mais c’est le gris qui lui sautait aux yeux. Le gris et le rouge des feux arrière des nombreuses voitures qui s’agglutinaient les unes aux autres.
La cacophonie de la ville montait jusqu’à lui. Bruits de circulation, de moteurs, de klaxons, cris de joie et de colère, cliquetis divers, aboiements,… Une tension presque palpable semblait indissociable de cet environnement urbain.
Le calme régnait cependant dans certains espaces. Le calme, la pureté et la beauté. Ce sont ces endroits-là qu’Ange aimait découvrir et faire découvrir. Il ferma les yeux pour se replonger dans le parc qu’il avait trouvé la veille. Ou qui l’avait trouvé. Des fois, il ne savait plus. Il s’était senti comme un marcheur égaré qui trouve enfin une oasis au coeur du désert : la joie, la libération, l’extase. Il avait pénétré dans un autre monde. La quiétude et la fraîcheur l’avaient immédiatement entouré, comme un confortable cocon de langueur. Il avait trouvé un banc et s’était assis. Il avait offert son visage à la caresse du vent, son esprit à l’ardeur des pensées, son corps au calme ressourçant.
Un coup de klaxon intempestif le ramena brutalement dans le petit appartement d’un immeuble immense et anonyme. Il soupira. De son balcon, il ne voyait aucune verdure, aucun espace paisible. Juste la violence insidieuse et invisible de la ville gigantesque. Les immeubles grignotaient progressivement les espaces verts.
Il regrettait la verdure et l’immobilisme, regrettait que personne n’ait réussi à initier un changement. Quand lui-même avait eu l’âge de s’impliquer, il était trop tard. La nature semblait agoniser.
Deux bras l’enlacèrent par derrière avec douceur. Les lèvres de Gaia se posèrent tendrement dans le bas de son cou.
– Encore avec tes pensées noires ? chuchota-t-elle.
– Des pensées grises, grises comme la ville à nos pieds…
– Tu deviens poète, quand tu es mélancolique…
Il n’avait pas besoin de la voir pour savoir qu’elle souriait à ces mots.
– Regarde le béton qui envahit la ville, s’empare de l’espace, recouvre la terre, coupe le souffle du monde. Comment garder espoir ?
– Regarde la vie qui grouille à tes pieds de manière ininterrompue, mon Ange, elle jaillit, court, ralentit, bruisse, crie, hurle, respire…
– Où est la nature, Gaia ? Elle a disparu.
– Non, elle se cache. Elle peine à se faire entendre. Mais toi, tu es à son écoute, et tu n’es pas le seul. Il faut juste les trouver.
Ange se tourna vers elle :
– Comment fais-tu pour y croire encore ?
– Je suis une optimiste. Tant que quelques fous croiront que le monde peut être sauvé et que la vie mérite d’être protégée, alors tout reste possible…
Ange se perdit dans les lacs purs des yeux de Gaia, qui se perdit dans les forêts, qui s’égara dans les lacs, qui s’immergea dans les forêts, qui
L’horloge sonna.
Gaia le regarda avec son sourire mystérieux, celui qui signifiait qu’il n’avait pas compris mais que cela viendrait. La voix cristalline de la jeune femme s’éleva doucement dans l’air du soir :
Éclat de rire, éclat de sourire
Et la vie surgit d’un regard : elle grandit portée par le vent
Une graine nourrie d’amour et d’espoir
Une graine semée dans les coeurs
C’est le début du printemps
Ange ferma les yeux et laissa le chant de Gaia l’emporter.
Il était une fois la Terre,
Chant de Vie,
Chant d’univers.
Il était une fois la Terre
Ville et vert en harmonie,
L’espoir renait de l’hiver.
Éclat de sourire, éclat de joie
Ils se retrouvent brutalement : la conscience s’est imposée
Le monde est habité, il faut cohabiter
Ne pas tout gaspiller, ne pas gâcher.
Un trésor à protéger.
Il était une fois la Terre,
Chant de Vie,
Chant d’univers.
Il était une fois la Terre
Ville et vert en harmonie,
L’espoir renait de l’hiver.
Dans le silence qui revint, les lèvres d’Ange et Gaia se cherchèrent, se trouvèrent, se joignirent.
Marine Ginot, 08/2018
Tous droits réservés
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Au plaisir d’échanges ! Bonne soirée ! 🙂
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Avec plaisir !
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Ce nouveau millénaire a débuté avec de grands traités gouvernementaux, avec de bonnes résolutions sur les manières de rétablir tant bien que mal l’équilibre biologique de notre belle planète, mais je crois qu’il faudra finir par s’y résoudre :
la survie des espèces ne viendra que de leurs facultés d’adaptation et de leurs aptitudes aux évolutions morphologiques.
Marine, j’approuve ce sens aigu de la responsabilisation de chacun, évoqué dans cette nouvelle de fiction fort agréable à lire, je souscris sans réserve à cette prise de conscience.
Le message est passé !
Bien amicalement.
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Merci !
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