coittri, le 15ème jour d’ima
en approchant des côtes du Raliomèn
Cher journal,
Je me suis réveillée dans ma couchette avec un mal de crâne épouvantable et des contusions un peu partout. Je ne me souviens pas comment je suis arrivée dans ma cabine ni comment j’ai réussi à me blesser à autant d’endroits différents… J’ai mal partout… La lumière du jour entre par la lucarne. M’éblouit.
– Tu es réveillée ! Enfin !
Je me crispe involontairement quand la voix d’Ethan carillonne dans ma tête.
– Tais-toi ! lui ordonne froidement et doucement Zilhostynaé. Elle a besoin de repos et de calme.
J’ouvre douloureusement les yeux. Ethan me regarde en souriant, mais Zilhostynaé me jauge du regard. La Sonniste me tend un bol fumant en m’expliquant que cela apaisera la douleur, sous toutes ses formes. Visiblement, j’ai grimacé en essayant de m’asseoir… Ethan m’indique que le capitaine veut me parler quand je serais capable de quitter ma cabine puis ils me laissent avec mon thé calmant et mes multiples douleurs. C’est douloureux.
J’avale péniblement mon thé à petites gorgées. Ça brûle, mais l’effet est presque immédiat. Je sens la douleur refluer progressivement. Mais il me faut de longues minutes avant de parvenir à quitter ma couchette. Et encore, je me déplace au moins aussi lentement qu’un escargot.
Je finis par rejoindre la cabine du capitaine. Un diner nous attend et je m’assois avec soulagement dans l’un des fauteuils de l’espace salon.
– Comment te sens-tu, Enora ?
Je n’étais pas sûre qu’il m’avais tutoyé après l’affrontement, mais cette phrase le confirme et fait de moi un membre de son équipage. Je suis émue. Et gênée.
– Ça va mieux, merci.
– J’ai été impressionné. Ton intervention d’hier était vraiment très courageuse. Insensée, mais courageuse.
Je ne sais pas quoi dire, je me contente de le remercier. Je me sens intimidée.
– Ethan m’a parlé de ton petit soucis de trajet retour. Tes exploits d’hier font de toi l’une des nôtres, nous ferons avec plaisir ce petit détour pour garantir ta sécurité. Et rassurer tes parents.
Serait-ce de l’humour ? Je crois bien qu’il sourit. Je me sens moins mal à l’aise, d’un coup. Il me libère peu après. Le bibliothécaire est sorti de sa cabine et m’attend. Il a le teint verdâtre et son ton est agressif. Cela fait sortir le capitaine qui lui indique fermement de se mêler de ses propres affaires. C’était étrange, comme moment…
Je rejoins Ethan et Zilhostynaé sur le pont et m’accoude au bastingage.
– On va arriver cette nuit, finalement, m’apprend le jeune marin. On a fait plus vite que prévu en prenant la fuite. Quelqu’un vient te chercher au port ?
– Non. Mais ma soeur sera là demain.
– Tu dois être soulagée. La terre est quand même moins animée…
– Pas dans ma famille, je souris. J’ai hâte de les revoir.
Nous restons un moment en silence, à contempler la lumière qui disparait dans les vagues. Les oranges et les roses explosent dans le ciel et crée une harmonie de couleurs. Le vent léger souffle entre nous et je frissonne. Ethan pose sa veste sur mes épaules et et je remarque que Zilhostynaé s’est éclipsée. Je remercie le marin et m’enveloppe dans sa veste avec soulagement. Elle est bien chaude et sent le sel, une odeur que j’ai appris à aimer. Je frissonne encore et il m’attire contre lui. Le silence nous entoure et l’air de la mer nous enveloppe. Je savoure le moment.
Des lumières apparaissent au loin. Kyor, l’un des principaux ports du Raliomèn. Je devine la silhouette de la citadelle qui surplombe la ville, là où travaille ma soeur. La ville parait de plus en plus immense à mesure que nous approchons. J’avais oublié la démesure du Raliomèn : dans l’Archipel, toutes les villes sont petites. Kyor m’écrase de son immensité. Je peux presque déjà entendre la foule et ses bruits, la circulation, les voix,… C’est l’une des choses que je préfère dans l’Archipel de Ney : le calme. L’Archipel est dédié à l’étude et la recherche, loin de la frénésie des grandes villes. C’est probablement aussi pour ça que j’ai beaucoup apprécié ce séjour en mer…
Nous sommes arrivés à Kyor. Je dois m’en aller. Zilhostynaé me salue et me souhaite bonne chance. Je fais de même pour elle et le libraire malade, à propose de leur mission. Ethan m’enlace et glisse un objet dans mon manteau et le capitaine me fixe la date du départ pour l’Archipel.
Puis c’est fini. Je descends du bateau lentement avec mes bagages.
– Enora !
Théa m’engloutit dans une étreinte sans me laisser le temps de poser mes affaires. Ma soeur adore les effusions enthousiastes.
– C’est fou ce que tu as changé ! Regarde-toi ! Tu es magnifique ! Et qui c’est, ce garçon qui te dévore des yeux ?
J’éclate de rire, c’est plus fort que moi. Théa n’a absolument pas changé. Je ne regarde pas derrière moi pour savoir de qui elle parle, je ne suis pas sûre de vouloir savoir.
– C’est personne. Tu savais qu’on arriverait plus tôt ?
– Bien sûr ! Je sais tout ce qui concerne le port. Tu viens ? On part tôt demain matin. Les parents ont hâte de te revoir ! Et les autres aussi, toute la tribu vient passer quelques jours à la maison pour l’occasion.
J’ignorais que mon retour avait déclenché une telle réaction… Toute la tribu, ça veut dire que la maison va être très animée… Je suis presque rentrée.
Marine Ginot, 10/2018
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