Bonjour Ă tous,
Lors dâune Ă©dition de VirtuaâLivres (clic), jâavais passĂ© un trĂšs bon moment sur le stand vocal des Ăditions Noir dâAbsinthe (clic) et cette rencontre mâavait donnĂ© trĂšs envie de dĂ©couvrir davantage cette maison dâĂ©dition !
Je les remercie donc vivement de mâavoir proposĂ© de dĂ©couvrir Noir, un recueil de nouvelles qui mâa beaucoup plu !
Présentation
Noir est un recueil de nouvelles autour du thĂšme « noir », comme son titre lâindique. Il est publiĂ© aux Ă©ditions Noir dâAbsinthe (clic) sous la direction dâĂmilie Chevallier Moreux.
Il se compose de 13 nouvelles (dont une en deux parties) Ă©crites par (dans lâordre dâapparition) : Louise Le Bars, Morgane Stankiewiez, Sarah Buschmann, KeoT, StĂ©phane Miller, Sarah Delysle, Cyril Fallavolita, Alexandra Fiordelli, Patrice QuĂ©lard, Wielfried Renaut, Michelle Labeeu, Jordi Vila Cornellas et Mathilde Chau.
Je prĂ©cise que le recueil est pour adulte. Je nâavais pas cet Ă©lĂ©ment en tĂȘte et cela mâa un peu prise de court au dĂ©but.
Mon avis général
Ce recueil mâa beaucoup plu !
Les 13/14 textes proposent diffĂ©rentes interprĂ©tations du thĂšme, diffĂ©rentes atmosphĂšres. Chacun donne Ă voir la noirceur dâune Ăąme, dâun corps, dâun environnement, dâune enquĂȘte. Entre ombres extĂ©rieures et tĂ©nĂšbres intĂ©rieures, les rĂ©cits sâincarnent en nuances de noir et de pĂ©nombre, Ă la frontiĂšre de lâinconfort et du dĂ©rangeant.
Jâai globalement apprĂ©ciĂ© de passer dâun environnement Ă lâautre, de dĂ©couvrir plusieurs plumes et plusieurs univers. MalgrĂ© la rĂ©currence dâune enquĂȘte dans la plupart des textes, le recueil nâest absolument pas redondant : les atmosphĂšres, les plumes et les personnages donnent Ă chaque nouvelle sa spĂ©cificitĂ©.
Au fil des pages, le noir prend de multiples apparences, de multiples formes, toue à tout environnement, ambiance, genre du texte, absence de lumiÚre, état moral, miroir intérieur et élément cinématographique.
En nuances de gris, chaque personnage, chaque voix, vient raconter une histoire particuliĂšre, donner Ă voir son monde, dĂ©voilant ses propres failles et parfois certaines lumiĂšres intĂ©rieures. CrĂ©dibles par leur complexitĂ©, sincĂšres parfois jusque dans le mensonge, forts de leur faille, atypiques, en rupture ou bien intĂ©grĂ©s, ils Ă©voluent, sâaffrontent, dĂ©couvrent et ouvrent leurs yeux sur ce monde de noirceur qui les entoure, ou sur une noirceur qui se dĂ©voile distraitement, presque involontairement.
Un petit mot sur certaines nouvelles qui mâont plus particuliĂšrement marquĂ©e
Pour chaque chronique de recueil, je sĂ©lectionne 5/6 textes (selon le nombre total de nouvelles) qui mâont plus particuliĂšrement marquĂ©e ou plu.
Voici donc leur titre, leurs premiĂšres lignes et un court avis plus spĂ©cifiquement dĂ©diĂ© Ă chacune dâelle.
Intime projection â Louise Le Bars
â LâĂ©cran projette une lumiĂšre cendreuse sur une poignĂ©e de visages dissĂ©minĂ©s entre les siĂšges. Il nây a que quatre spectateurs ce soir pour la projection du film noir.
Une luxueuse suite dâhĂŽtel plongĂ©e dans un clair-obscur ouatĂ© de rideaux, propice au venin du meurtre ou de lâamour. En fond sonore, un saxo gĂ©mit un chant du cygne sensuel et dĂ©sespĂ©rĂ©. â
Il sâagit de la nouvelle en deux parties que jâĂ©voquais prĂ©cĂ©demment, dont, personnellement, jâai prĂ©fĂ©rĂ© la seconde partie, en conclusion du recueil.
Les deux textes, en ouverture et en clĂŽture du recueil, sont fluides et entraĂźnants, jâai particuliĂšrement apprĂ©ciĂ© la mise en description de la musique et de lâatmosphĂšre du cinĂ©ma, lâentremĂȘlement entre rĂ©alitĂ© et fiction qui se jouent et se dĂ©voile.
Cancer Urbain â Morgane Stankiewiez
â On cogne Ă la porte, deux coups appuyĂ©s.
Dehors, la nuit est tombĂ©e, et il flotte toujours autant. Il nây a pas grand monde dans les rues. Il faut dire que les pluies dâacide ont un talent certain pour vider la ville de sa population. Blaska redresse les oreilles, sans sâinquiĂ©ter. Ce colley nâest dĂ©cidĂ©ment pas terrible comme chien de garde⊠â
Cela commence comme une enquĂȘte, en nuances de noir et dâobscuritĂ©, avant de devenir une quĂȘte, de sens et dâidentitĂ©. Le cadre particulier, futuriste et mortifĂšre, mâa entraĂźnĂ© de pages en pages, vers la rĂ©solution de la quĂȘte, au fil des dĂ©couvertes, entre ivresse de vie et dĂ©sirs de mort. Tout semble noir et dĂ©sespĂ©rĂ© dans ce monde, Ă commencer par le moral morose des personnages et la violence protĂ©iforme qui les environne.
Le Sang du cĂ©nacle â KeoT
â LâĂ©cho dâune conversation houleuse filtre Ă travers la porte. Des pleurs. Jâentre sans un bruit, si ce nâest celui du battant que je referme derriĂšre moi.
La grande piĂšce est Ă©clairĂ©e aux lanternes ; le reflet des flammes vacille sur les boiseries complexes du plafond. Sur le grand lit Ă baldaquin, les silhouettes en robes des mĂ©decins de la cour entourent une forme allongĂ©e. â
Jâai Ă©tĂ© conquise par lâunivers et jâai vraiment regrettĂ© de le quitter ! Comme si la nouvelle donnait un aperçu dâun univers plus vaste, et jâavais envie de poursuivre ma dĂ©couverte, dâen savoir plus sur ZoĂŻe, les goules et les nĂ©cromanciens, ce monde qui sâouvrait le temps dâune nouvelle, entre noirceur ambiante et Ă©clat intĂ©rieurs de certains personnages. Lâintrigue est prenante, dynamique, entre secrets et non-dits, elle donne Ă voir le monde et certaines de ses subtilitĂ©s.
Mort â Cyril Fallavollita
â Câest fou comme tous les lundis matin se ressemblent. Quâimporte lâespace-temps, tous ont cette mauvais mine mal rĂ©veillĂ©e, fatiguĂ©e des deux jours de repos qui les ont prĂ©cĂ©dĂ©s, lâair encore paralysĂ©e par cette gueule de bois du week-end, qui donne au soleil les yeux qui collent et au vent lâhaleine pĂąteuse. â
AprĂšs un dĂ©but peut-ĂȘtre un peu trop lent et mystĂ©rieux, trop mystĂ©rieux, peu Ă peu, lâunivers fait sens et lâintrigue sâemballe. N., la narratrice, prend peu Ă peu corps, derriĂšre son mur dâindiffĂ©rence et dâattentisme, au fil dâune enquĂȘte particuliĂšrement inattendue. Mais jâai Ă©tĂ© entraĂźnĂ©e par sa voix, par son dĂ©sintĂ©rĂȘt teintĂ©e de pessimisme. Et la fin est particuliĂšrement savoureuseâŠ
La Nuagerie â Wilfried Renaut
â Le souffle de la ville tourbillonne Ă lâintĂ©rieur de ma capuche. Son vortex se condense et rĂ©duit sa circonfĂ©rence. Il confie Ă mon tympan les repĂšres sonores qui me guident dans les rues. Le grĂ©sillement parasite de la devanture du resto indien sur ma droite ; le clignotement des ampoules du bar anar sur ma gauche. Devant sâouvre un espace le long duquel le son de mes pas se propage sans obstacle. â
Jâai particuliĂšrement apprĂ©ciĂ© cet univers ! Les capacitĂ©s des sombrevoyants et leur façon dâapprĂ©hender le monde mâont entrainĂ© au fil de la voix de la narratrice, Tali. LâenquĂȘte quâelle mĂšne se met au service de la dĂ©couverte de lâunivers et des sombrevoyants et cette immersion mâa bien plu. Lâenvironnement est crĂ©atif, entraĂźnant, proposition une anticipation avec une touche de fantasy.
Le mot de la fin
Jâai beaucoup apprĂ©ciĂ© ma lecture et les voyages quâelle mâa proposĂ© !
Le noir prend de multiples formes, apparences et attitudes. Il se dissimule et se dĂ©voile, sâaffirme et se transforme. Il entraĂźne, raconte, imprĂšgne lâunivers ou seulement les personnages, dĂ©truit, donne voix, prend corps.
Ă bientĂŽt,
Marine
Image d’en-tĂȘte rĂ©alisĂ©e avec Canva.